Dossier d’œuvre architecture IA29001117 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des fortifications littorales de Bretagne
  • enquête thématique régionale, Inventaire des héritages militaires en Bretagne
Fort du Minou (B 323), Pointe du Petit Minou (Plouzané)
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne - Brest-Plouzané
  • Commune Plouzané
  • Lieu-dit Pointe du Petit Minou
  • Cadastre AH n° 54 ; AH n° 55 ; AH n° 56
  • Dénominations
    fort
  • Appellations
    Fort du Minou

Batterie d’artillerie de côte, redoute puis fort, phare avec son pont, batterie à tir rapide, batterie casematée, bunkers, poste de commandement, tour sémaphore supportant un radôme (le radôme est démonté), le fort du Minou à Plouzané, situé à l’entrée du goulet de Brest abrite tout cela à la fois. En surplomb du fort du Minou, se trouvent, la batterie de 24 du Minou, la batterie du Sémaphore du Minou et des bunkers : casemates pour canon, postes d’observation et de tir et des tranchées.

En breton, min (minou au pluriel) signifie la bouche, l’embouchure, en référence au goulet. A l’ouest de la pointe du Petit Minou se trouve la pointe du Grand Minou, nommée également Toulbroc’h, le trou du blaireau, autre grand site défensif lié à l'histoire de la ville-arsenal de Brest.

Déclassé en 2004 du domaine public militaire, le fort du Minou est transféré du Ministère de la défense au Conservatoire du littoral. Sa gestion est confiée à la commune de Plouzané. Ce site emblématique, au point de vue exceptionnel sur la mer d'Iroise et le goulet de Brest, est ouvert librement à la visite. Un projet de valorisation du site de la pointe du Petit Minou est en cours.

Créée en 2019, l’association Les Vigies du Minou souhaite promouvoir, mettre en valeur et protéger le patrimoine littoral de Plouzané, et plus particulièrement le site du Petit Minou et son phare. Ce dossier d’Inventaire du patrimoine a été mis à jour en 2024 dans le cadre de l'Inventaire des héritages militaires.

Une batterie et une redoute de Vauban

"Le Minou. C’est la batterie la plus avancée du goulet à la grande mer. Il n’y avait que deux pièces de canons et deux mortiers. J’en ai fait ajouter quatre de 36 et y ferai encore mettre deux. On la ferme actuellement par derrière en redoute, la capacité du lieu ne permettant pas d’y faire autre chose ; elle sera fraisée et palissadée, et parce que la batterie serait encore plongée et vue à revers par les hauteurs, j’y ai placé un parados qui couvrira la batterie et ceux qui la serviront, et les mortiers le seraient par la partie du rempart qui sera plus élevé que le parapet des batteries. Les mortiers et le canon de cette batterie verront partie du mouillage de Bertheaume et l’entrée du goulet, elle est très bien placée". Vauban au roi, 15 juillet 1695.

Située à l’avant-poste du goulet de Brest, la batterie du Minou, projetée en 1689, est réputée construite en 1692 : "Cette batterie est de gazon terrassé et fasciné avec un fossé du côté de la campagne sans aucune palissade, il y a une plate-forme de charpente qu’il serait bon d’augmenter pour ajouter encore un mortier". La batterie est améliorée en 1695 et 1696 sur des plans de l’ingénieur Mollart contresignés par Vauban : elle devient "redoute". Dans le vocabulaire architectural vaubanien, les redoutes sont "les plus petites de toutes les fortifications fermées qui se fassent dans les règles". Côté mer, l’édifice se compose d’une batterie comportant onze embrasures et deux emplacements de mortier sur une plate-forme aménagée légèrement en contre-bas, tandis que du côté terre, il est fermé par une escarpe en éperon précédé d’un fossé sec que l’on franchit par un pont-levis (ou une passerelle mobile) lui-même précédé par un sas ou "tambour palissadé". À la fin du 18e siècle, la cour intérieure renferme une caserne, un logement pour l’officier, le logement des gardiens, un magasin à poudre et un corps de garde.

Des transformations importantes au 19e siècle

Selon les études de 1841 de la Commission mixte d’armement des côtes, de la Corse et des îles, composée d’officiers d’artillerie, du génie et de la marine, les batterie et redoute vaubaniennes du Minou sont amenées à devenir un véritable fort. Sur l’avis du comité des fortifications de fin 1844, les travaux s’étalent de 1845 à 1856 : les principales modifications concernent l’amélioration de la défense terrestre, la gorge et l’adaptation des anciens parapets à embrasures à la nouvelle artillerie qui tire à barbette (au-dessus du parapet). Si le fossé sec creusé dans le roc est approfondi et la hauteur de l’escarpe sensiblement augmentée, le fossé est désormais flanqué par deux "ailerons" (disposés aux deux extrémités), percés de créneaux de tir et dotés chacun d’un mâchicoulis sur arc. L’escarpe du fort est surmontée d’un mur à la Carnot (en référence à l’ingénieur militaire Lazare Carnot) percé de créneaux de tir et d’un parapet à terre coulante derrière lequel se trouve une banquette de tir pour les troupes d’infanterie. L’entrée du fort a été également remaniée : dotée d’une porte monumentale à pont-levis surmontée d’une bretèche, son style est épuré. Une citerne et un four à pain sont construits vers le milieu du 19e siècle tandis que les casernements sont modernisés pour accueillir la garnison de 60 hommes et leur officier (effectif théorique correspondant au nombre de pièces d’artillerie). En 1864, le fort du Minou est doté de six canons de 30 livres de balle modèle 1840 sur affût pivotant et de six obusiers de 22 cm modèle 1827 sur affût de fer pivotant. Un phare est élevé sur la pointe en 1848.

De l’embryon défensif vaubanien sur la pointe du Minou, la défense s’est étendue latéralement et s’est considérablement renforcée : à l’ouest tout d’abord sur le site du Grand Minou (plus connu sous le nom de Toulbroc’h) qui est choisi pour accueillir de nouvelles batteries d'artillerie de côte (dès 1695 et jusqu’en 1944) et l’une des rares tours-modèles de Napoléon (1812-1813, remplacée par un réduit en 1884) construites pour la défense du port de Brest, à l’est, vers le hameau de Kerangoff où sont installées deux batteries d'artillerie à partir de la décennie 1880 (batterie de 32 cm du Minou dite batterie du Sémaphore du Minou : 1885-1886 et batterie de 100 mm : 1896-1897), au nord enfin avec la construction de la batterie de 24 cm du Minou en 1886-1887.

L’ensemble de ces positions est nommé à la fin du 19e siècle "batteries de Toulbroc’h et de Minou". Dans l’enceinte du fort, une batterie casematée pour deux canons de 32 cm de calibre et son magasin sous roc sont aménagés de 1887 à 1889, tandis qu’une batterie d'artillerie de petit calibre à tir rapide (quatre canons de 47 mm) prend place sur la pointe autour du phare. Le couloir menant à l’aileron ouest est alors transformé en magasin à munitions.

Un 20e siècle mouvementé

Le fort du Minou sert d’hôtel dans les années 1930 en raison de sa situation idyllique face à la mer. Mais la Seconde Guerre mondiale n’oublie pas le fort du Minou numéroté "B 323" qui devient le poste de commandement du groupe d’artillerie côtière de marine 262 de Brest (MAA 262). Un poste de direction de tir de type M 162a (modifié) est coulé sur l’ancienne batterie d'artillerie de côte française. Sa construction a nécessité 1 000 m3 de béton armé. Deux pièces antiaériennes de 2 cm en encuvement assurent la défense du fort tandis qu’un poste de combat pour mitrailleuse prend la plage du Minou en enfilade. La batterie casematée sert d'abri anti-aérien, Luftschutzbunker.

A l’extérieur du fort, deux bunker - casemates de type 671 pour canon de marine 8,8 cm (SK C/35) et un poste d’observation bétonné sont construits. La position compte une importante défense rapprochée englobant le périmètre de la batterie de 24 du Minou et de la batterie du Sémaphore (batteries de 32 et de 100) à l’est. Réseaux de barbelés et champs de mines complètent le dispositif défensif de la pointe tandis que l'accès à la plage du Minou est fermée par des barrières métalliques et la plage minée. Le fort du Minou cède le 4 septembre 1944.

Pendant la Guerre froide, le bunker du fort du Minou voit sa surface doublée par la construction d’un poste de commandement. C’est, semble-t-il, à cette date que les anciens bâtiments qui avaient résisté aux combats de 1944 sont finalement rasés pour laisser place à des antennes. Une tour sémaphore supportant un radôme est construite à côté du phare en 1960 pour assurer le contrôle du trafic maritime en mer d’Iroise et à l’entrée du goulet de Brest.

Déclassé en 2004 du domaine public militaire, le fort du Minou est transféré du Ministère de la défense au Conservatoire du littoral. Sa gestion est confiée à la commune de Plouzané. Ce site emblématique, au point de vue exceptionnel sur la mer d'Iroise et le goulet de Brest, est ouvert librement à la visite. Le phare du Petit Minou appartient à l'état (Phares et Balises).

Le fort est implanté à l’entrée du Goulet de Brest, sur la pointe du Petit Minou à Plouzané. Construit en maçonnerie et en terre, le fort est défendu par un profond fossé sec taillé dans le roc. Il est fermé du côté de la terre par deux escapes qui se coupent au nord à angle droit. A l’ouest, le fort conserve son aileron percé de créneaux de tir et doté d’un mâchicoulis sur arc (l’aileron oriental est détruit). Immédiatement à droite de l’entrée du fort, le mur d’escarpe conserve la trace d’un bâtiment construit dans le fossé.

Un pont-dormant en béton armé permet de franchir le fossé et d’accéder à la porte d’entrée du fort. L’entrée monumentale en arc plein cintre est surmontée d’une bretèche encadrée de deux rainures verticales pour le mouvement des flèches du pont-levis [disparu]. Passant sous l’escarpe, le passage d’entrée voûté débouche dans la cour. Dans le passage d’entrée à gauche, une porte donne accès à la batterie casematée [cet accès fut longtemps fermé par une porte blindée]. Sous le fort et le fossé du côté oriental est en effet implantée la batterie casematée dont on voit les deux cheminées verticales d'aération dans le fossé. Une citerne à carburant est également aménagée dans le fossé.

L’escarpe du fort est surmontée d’un mur percé de créneaux de tir et d’un parapet à terre coulante derrière lequel se trouve une banquette de tir pour les troupes d’infanterie. Sur l’escarpe est également implantée une citerne de plan carré surmontée d’une cuve circulaire pour arme antiaérienne. A l’ouest se voient deux niches à munitions.

Dans l’escarpe à droite, un couloir voûté donne accès à l’aileron occidental transformé ultérieurement en latrines. Si l’escarpe de droite est en maçonnerie de moellon équarri montée très régulièrement, celle de gauche est en maçonnerie de moellon irrégulier (correspondant sans doute à une partie plus ancienne du fort). A gauche, la maçonnerie conserve des témoins de fissure dont l’un est daté du 29 juin 188[6?].

Les bâtiments du fort sont détruits ainsi que le logement qui subsistait dans la cour.

Dans la falaise à l’ouest, côté plage du Minou, se trouve un poste d’observation et de mitrailleuse couvert.

La batterie d’artillerie de côte est visible depuis le pont du phare (1848) : c’est sur cette dernière – reconnaissable avec sa maçonnerie de moellon équarri surmonté d’une tablette - qu’est implanté le bunker - poste de commandement de type M 162a modifié. Ce bunker en béton armé a été agrandi (durant la Guerre froide).

Le pont donne accès au phare du Minou et à la tour sémaphore pour radôme (le radôme est démonté). Au pied du phare se trouvent les vestiges de la batterie à tir rapide de 47 mm : deux niches à munitions accessible par un escalier au nord et une sellette d’affût visible au sud-ouest (plaque en acier rectangulaire).

Le front sud-ouest du fort est marqué par l’érosion marine. Le pavage du pont d’accès au phare présente des désordres importants.

Depuis la grève située en contrebas du fort, sont visibles les deux embrasures et le massif central en maçonnerie de la batterie casematée. En haut de la grève subsistent également les vestiges d’une sous-sellette en granite ou "dé" d’où émerge deux (sur quatre) tiges filetées pour la fixation de la sellette en fer de l’affût pour canon de 30 livres ou obusier de 22 cm.

  • Murs
    • granite maçonnerie
    • moellon
  • Toits
    pierre en couverture, terre en couverture
  • Couvertures
    • terrasse
  • État de conservation
    état moyen, inégal suivant les parties
  • Statut de la propriété
    propriété d'un établissement public, le fort du Minou et sa batterie casematée ont été déclassés du domaine public militaire (poste militaire de deuxième série) par décret du 17 mars 2004. Cet ensemble appartenant au Conservatoire du littoral est géré par la commune de Plouzané.
  • Intérêt de l'œuvre
    vestiges de guerre, à signaler
  • Éléments remarquables
    fort

Bibliographie

  • COUDURIER (l.). Brest et ses environs, De Brest au Conquet par le chemin de fer électrique. Brest, 1904, 336 p.

    Centre de Recherche Bretonne et Celtique, Bibliothèque Yves Le Gallo (Brest) : D 5167
  • PETER, Jean (préface de Jean Meyer). Vauban et Brest. Dossier. Une stratégie modèle de défense portuaire, 1683-1704. Paris, Economica et Institut de Stratégie Comparée, 1998, 320 p.

    p. 274-275
  • BARROS, Martin. CHAZETTE, Alain. "Les batteries du Minou à Brest". Paris : Fortifications et Patrimoine, Bulletin de l´Association Le Mur, 2001.

    p. 180-191
  • JADÉ, Patrick. "Les ouvrages de fortification littorale du port de Brest - 1872-1917. La défense des côtes en France à l'âge industriel". Mémoire de maîtrise d'Histoire Contemporaine de l´Université de Bretagne Occidentale, sous la dir. de M.-T. Cloître, 2004, 293 p. et 141 p.

  • FRIJNS, Marco, MALCHAIR, Luc, MOULINS, Jean-Jacques, PUELINCKX, Jean. Index de la fortification française. Métropole et Outre-mer. 1874-1914. Vottem (Belgique) : autoédition, 2008, 832 p.

  • LÉCUILLIER, Guillaume (dir.), BESSELIÈVRE, Jean-Yves, BOULAIRE, Alain, CADIOU, Didier, CORVISIER, Christian, JADÉ, Patrick. Les fortifications de la rade de Brest : défense d'une ville-arsenal. Rennes : éditions Presses Universitaires de Rennes, collection Cahiers du patrimoine, 2011, n° 94, 388 p.

    Région Bretagne (Service de l'Inventaire du patrimoine culturel)
    p. 197-199

Documents figurés

  • Bibliothèque du Génie : manuscrit in f°33g tome 2 atlas. Plan de la redoute et batterie des Minoux [sic], support papier, 4e quart 17e siècle, 15 juillet 1695, Vauban.

    Service Historique de la Défense du Château de Vincennes : Ms33gT2n°11f7
  • Archives du Génie, Article 8, section 1, Brest carton 1. 1VH446n°30_2_1696. Plan des batteries et redoute du Minou, support papier, 4e quart 17e siècle, 23 janvier 1696, Mollart.

    Service Historique de la Défense du Château de Vincennes : 1VH446n°30_2_1696
  • Collection Nivart. MS144_236. Forts de Bertheaume et du Minou. Plans généraux. Vers 1770. Cachet du dépôt général des fortifications. Plan, support papier, 0,980 x 0,665 mètre, 3e quart 18e siècle.

    Service Historique de la Défense du Château de Vincennes : SHDMD07001907_P
  • Série Z. Sous-série Z : plans du Génie. Plans et calques provenant des chefferies du génie de Brest et de Quimper. Plan, support papier, 19e siècle.

    Service Historique de la Défense de Brest : Génie E : 19e siècle. Plans terriers, levers des batteries de côte et plans d´affermage concernant les bâtiments militaires de la place du Conquet. 98 pièces. E 67 (G25) : Carte 1/2000. Batteries du fort du Minou, du Mengant, du Dellec avec légendes

Documents multimédia

  • Décret du 17 mars 2004 portant déclassement du domaine public et en tant que poste militaire de deuxième série du fort du Minou et de la batterie basse casematée du Minou sis sur le territoire de la commune de Plouzané (Finistère).

    https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000438431

  • Association "1846". JADÉ, Patrick. "Batteries casematées du goulet de Brest". 15 Juin 2018.

    https://association-1846.over-blog.com/2018/06/batteries-casematees-du-goulet-de-brest.html

  • Association "Les Vigies du Minou". "Visite panoramique à 360 degrés de la batterie casematée du Petit Minou". 21 janvier 2021.

    https://www.lesvigiesduminou.bzh/index.php/2021/01/21/visite-panoramique-a-360-de-la-batterie-de-rupture-du-petit-minou

Annexes

  • Mollart (de) (alias de Mollard, du Mollard, du Mollart) d'après BLANCHARD (A.), Dictionnaire des ingénieurs militaires 1691-1791, Montpellier, 1981, 2 tomes.
  • Le Minou in Brest et ses environs, De Brest au Conquet par le chemin de fer électrique, Brest, 1904 par Coudurier
  • La batterie du Minou par Jean Peter, 1998 in Vauban et Brest. Dossier. Une stratégie modèle de défense portuaire, 1683-1704
  • Iconographie
Date(s) d'enquête : 2002; Date(s) de rédaction : 2002, 2024
(c) Association Pour l'Inventaire de Bretagne
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
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