En 2022, date de l'enquête, plusieurs pardons sont encore organisés chaque année, à la chapelle Ty Mamm Doué :
- Le pardon du carême, le 3e samedi durant la période du carême, reflet d'une pratique dévotionnelle ancienne et assidue à cette date ;
- Le pardon mud ou pardon muet qui a lieu le jeudi saint, c'est-à-dire le jeudi précédant Pâques ;
- Le pardon principal ou "grand pardon", le 1er dimanche de juillet ;
- Le pardon des aînés ou pardon du rosaire, à destination des anciens, au mois d'octobre, dont on dit en 1950, qu'il est désormais entré dans la tradition (Ouest-France, samedi 9 septembre 1950).
Histoire et objets du grand pardon
Le grand pardon existe probablement depuis longtemps déjà quand, en 1812, le propriétaire des terres sur lesquelles s'élève la chapelle, s'érige contre sa restauration, au motif que "les rassemblements qui se font sous prétexte de dévotion, aux abords de ces chapelles [la chapelle Ty Mamm Doué et l'oratoire disparu depuis 1969], causent un tort notable à sa propriété, en ce que les pèlerins foulent ses terres ensemencées, coupent les bois et dégradent les clôtures de manière que chaque année, il lui faut renouveler des plantations qu'il a faites à grands frais" (Archives départementales du Finistère, 1 V 368).
Le fait est qu'après la Révolution, la dévotion mariale connaît un nouvel essor dans cette chapelle, comme dans la plupart des sanctuaires de pèlerinage dédiés à la Vierge. En 1822, le retour de la statue de Notre-Dame de Ty Mamm Doué, cachée dans la chapelle de Cuzon depuis plusieurs années, donne lieu à une grande et fastueuse procession qui permet d'affirmer et de fêter le rétablissement du culte.
Le détail des objets portés en procession lors du grand pardon n'est pas connu précisément avant le 20e siècle. Le bulletin paroissial, édité à partir de 1909, nous apprend qu'au cours de la première moitié des années 1910, une "grande bannière" et une "petite bannière" sont portées indifféremment par des hommes et par des femmes. L'iconographie de ces bannières n'est pas précisée mais on peut supposer que la bannière de Notre-Dame de Ty Mamm Doué et de sainte Anne, correspond à l'une d'elles. Les statues, selon si elles représentent un sujet féminin, sont portées par des fidèles de l'un ou de l'autre sexe. On note qu'à cette époque, deux statues de Vierge sont processionnées, une statue dite "de la sainte Vierge" et une autre dite de "Notre-Dame de Lourdes". La première est peut-être la statue de Notre-Dame de Ty Mamm Doué, évoquée plus haut, même si aucun document n'atteste cet usage. A noter cependant qu'elle est figurée portée en procession sur la verrière du bras sud du transept, qui représente dans sa partie inférieure une procession de pardon. La seconde statue, dite de "Notre-Dame de Lourdes", est sans doute celle conservée en 2022 dans le grenier de l'église de Kerfeunteun. Cette dernière statue n'intervient plus dans la célébration du pardon, à la date de l'enquête (2022).
Au début du 20e siècle, le grand pardon a lieu le premier dimanche de juillet, comme en 2022, en lien avec la fête de la Visitation, précisément célébrée le 2 juillet jusqu'en 1969. En 1969, la fête est déplacée dans le calendrier liturgique au dernier jour du mois de mai, ou mois de Marie. Mais à Ty Mamm Doué, on conserve cette date du début du mois de juillet pour le grand pardon.
Le grand pardon au 21e siècle, entre tradition et renouvellement
Depuis 2002 est à nouveau organisée une procession, alors que cette tradition s'était éteinte (dernière procession documentée par un film amateur de 1948). Des délégations de paroisse se joignent aux pardonneurs de celle de Kerfeunteun, dont relève la chapelle, mêlant leurs bannières à la nouvelle bannière de Notre-Dame de Ty Mamm Doué (2013) et à celle de la Sainte Trinité et de saint Corentin venant de la cathédrale de Quimper. La croix de procession de type finistérien (17e s.), conservée à l'église de Kerfeunteun, est sortie pour l'occasion et placée devant la bannière de Ty Mamm Doué, selon un usage attesté dès 1930 mais qui s'est sans doute mis en place après le rattachement de la chapelle à la paroisse de Kerfeunteun, en 1801. Certains objets comme la bannière de 1944, offerte à Notre-Dame de Ty Mamm Doué en reconnaissance d'une grâce, ou le plat d'offrandes (16e s.) employé dans les anciens pardons pour distribuer de la brioche à la sortie de la messe, ne sont plus utilisés à la date de l'enquête (2022).
Une des particularités de cette procession est qu’elle est menée par des participants dont certains portent l'habit traditionnel, le costume glazik (petit bleu) pour les hommes, et la borledenn, coiffe du pays de Quimper, pour les femmes.
L'année de l'étude, en 2022, le grand pardon fait l'objet d'une couverture photographique. La procession part du rond-point du Ty Pont sur la route de Plogonnec et rejoint la chapelle Ty Mamm Doué. Tous les porteurs de bannière s’alignent alors face à l’autel de plein air, installé sur le placître, au sud de la chapelle. Les bannières sont bénies par les prêtres puis sont disposées contre le mur de la chapelle avec les croix de processions. S'ensuit la célébration de la messe en extérieur. Puis le cortège se reforme, les porteurs de bannières et de croix en tête, pour faire le tour de la chapelle dans le sens des aiguilles d'une montre. Les bannières se saluent et le cortège entre dans la chapelle par le portail ouest. Toutes les bannières sont apportées dans la croisée du transept. Une série de chants sont entonnés, comme la cantique à Notre-Dame de Ty Mamm Doué, qui rappelle les vertus de la Vierge et le miracle du don de la langue au père Maunoir, évènement marquant de l'histoire du sanctuaire.
Chargée d'études à l'Inventaire