Dossier thématique IA22133751 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, Inventaire du patrimoine lié à l’histoire toilière de la Bretagne
Prospérité toilière et chantiers paroissiaux (Le Quillio)

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aires d'études
    Uzel

Le Quillio est une trève de la paroisse de Merléac, située au cœur de la manufacture des « bretagnes » et dépendant du marché d’Uzel. La trève présente une population de 1 855 habitants en 1790. Du 17e siècle au premier quart du 19e siècle, la paroisse connaît une période de prospérité grâce à l’activité toilière. Celle-ci mobilise une grande partie de la population, composée majoritairement de tisserands et de fileuses. Cependant, ce sont les marchands de toiles qui occupent la position dominante au sein de la paroisse, tant par leur poids économique que par leur influence sociale. Le registre de Saint-Malo (1781-1791) mentionne 34 marchands de toiles, faisant du milieu marchand du Quillio, le plus important du marché d’Uzel.

Un milieu marchand prospère, exerçant une influence au sein du général de trève

Un général de trève monopolisé par le milieu marchands

Entre 1689 et 1773, l’assemblée du général de trève (assemblée de laïcs et de clercs chargée d’administrer les biens de la communauté paroissiale) se compose en grande majorité de marchands de toiles. Plusieurs d’entre eux appartiennent aux dynasties de notables qui composent le milieu marchand, s’établissant durablement au sein du général sur toute la période couverte par le registre de délibérations. Ces marchands se distinguent par leur titre de « sieur », signe de distinction sociale (associé, pour les plus importants d'entre eux, au nom de leur lieu-dit d'origine), qu’ils peuvent transmettre à leurs fils. La présence au sein du général est ainsi étroitement liée à la situation économique des trèviens. La mention régulière des mêmes familles sur la période couverte par les délibérations révèle qu'un groupe de marchands, parmi les plus aisés, est au centre du pouvoir décisionnel du Quillio. Si leur famille s’établissent sur le long terme, c’est aussi le cas pour la présence de plusieurs marchands eux-mêmes, présents comme délibérant pendant plus de 10 ans.

D'importantes dynasties de marchands de toiles

La famille Le Coédic présente deux lignées de marchands de toiles : les «  sieurs du Cosquer » et les « sieurs de Villeneuve ». La lignée des sieurs du Cosquer est identifiable sur trois générations au sein de l’assemblée des délibérants : Ellouan, Olivier et Hervé Le Coédic. Olivier Le Coédic fait édifier en 1738, une maison dans au Cosquer. L'autre branche des Le Coédic est incarnée par Gabriel Le Coédic, sieur de Villeneuve. Dans les documents d'imposition, Gabriel Le Coédic apparaît comme l'homme le plus fortuné de la trève dans la 1ère moitié du 18e siècle. Il présente une capitation de 47 à 70 livres entre 1734 et 1737, puis de 53 à 70 livres entre 1737 et 1750. L’implication de la famille dans le commerce de la toile peut être étendue à un certain « sieur de Kergohan Le Coédic ». Son absence au sein du général s’explique peut-être par des revenus plus modestes avec une capitation ne dépassant pas 20 livres.

La famille Guillo se compose elle aussi de deux lignées de marchands de toiles : les « sieurs de Lohan » et les « sieurs de Brince ». Les sieurs de Lohan sont représentés par Jacques père et Jacques fils Guillo. Jacques Guillo père fait construire une maison en 1717 au Lohan, puis son fils en fait bâtir une seconde, en 1758. En parallèle, la lignée des sieurs de Brince est incarnée avec Yves et Pierre Guillo. La filiation de l’activité marchande au sein de la famille Guillo se prolonge au moins jusqu’en 1781, date à laquelle Yves Guillo enregistre sa marque dans le registre de Saint-Malo. L’implication dans les fonctions locales perdure jusque dans la premier moitié du 19e siècle, lorsque Jacques Alexandre Marie Guillo-Lohan devient maire de la commune.

Trois lignées de marchands coexistent au sein de la famille Ollitrault : les « sieurs Duparc », les « sieurs de Kermarec » et les « sieurs de Bergereux ». La branche Duparc est représentée par François et Mathurin Ollitrault. Charles Ollitrault est l’unique membre de la famille à porter le titre de sieur de Kermarec. C’est la personne la plus fortunée du Quillio dans la seconde moitié du 18e siècle. Il est capité à 29 livres en 1746, puis à 60 livres en 1768. Sa présence au sein du général, qui est la plus longue de la trève, révèle le lien étroit entre fortune et implication dans les fonctions locales. Les sieurs de Bergereux s’illustrent au sein du général avec Louis, Jean et François Ollitrault. L’implication de la famille Ollitrault peut être étendue en dehors de l’assemblée du général avec Ollivier Ollitrault, sieur de Kerivalan, et mathurin Ollitrault dont les marques de marchands sont enregistrées dans le registre de Saint-Malo en 1781. Mais aussi, à des certain « sieur de la Motte Ollitrault » et « Ollitrault du Reste » mentionnés dans les documents d’imposition. L'importance de la branche "du Reste" de la famille Ollitrault transparait par les maisons qu'elle a fait édifier dans les lieux-dits du Reste et de La lande du Reste.

La famille Fraboulet compte parmi les familles les plus représentées au sein du général avec François Fraboulet, sieur de la Plaisse, Jean Fraboulet et Yves Fraboulet. Ces marchands s’inscrivent dans une lignée familiale d’une famille présente dans le général depuis la fin du 17e siècle, avec Jean, Maury et René Fraboulet. Si tous ne peuvent être identifiés avec certitude comme marchands de toiles, la fréquence de ce nom au sein du général, depuis la fin du 17e siècle, constitue un argument en faveur d'une lignée familiale active dans le commerce toilier.

Les Priat sont présent dans le général de la trève pendant une cinquantaine d'années à travers la lignée des « sieurs de Beaubourg », avec Eustache, Etienne et Joseph Priat.

Le général se compose en grande partie d’hommes issus de lignées de marchands. De fait, si la profession de certains délibérant ne peut être vérifiée, la présence sur plusieurs générations de leur patronyme au sein du général laisse à penser qu’il s’agit de marchands de toiles. Joseph Le Flahec, sieur Desmotte s’inscrit dans la continuité de nombreux membres de sa famille comme Ellouis, Yves, René et Maury Le Flahec. De plus, le passé marchand de la famille Le Flahec transparait aussi par une maison construite en 1663, par Mathurin Le Flahec, au Penher. La famille Le Goff est très présente au sein du général avec Louis, Jean, Eustache, Yves et René Le Goff. Seul Jean Le Goff peut être authentifié comme marchand de toiles. En 1760, il fait construire un nouveau logis à La Ville-au-Chevalier. La famille Caillibot compte parmi les familles les plus représentée dans le général avec Yves, Jean, Joseph, René et Jean Caillibot. Jean et Joseph s'illustrent comme députés, charge le plus souvent exercée par des marchands de toiles. Un groupe de marchands de toiles se maintient ainsi de manière héréditaire au sein de général.

L’assemblée accueil aussi un milieu marchand hétérogène avec des marchand qui s’y inscrive, sans pour autant réussir à maintenir leur famille de manière pérenne.

La charge de député

La charge de député (chargés d'assurer la bonne conduite des chantiers) souligne le rôle central des marchands dans les différents projets portés par la paroisse. Ils sont au moins 12 marchands sur les 14 recensés au Quillio, les deux autres, Jean et Joseph Caillibot étant probablement liés au commerce toilier.

 

La prospérité toilière du Quillio

La prospérité toilière se mesure dès le milieu du 17e siècle grâce à la valeur des dons. En effet, ils tournent autour de 200 livres entre 1654-1668. A partir de 1668, apparaît « la quête de Notre-Dame », les dons vont doubler et représenter, près de la moitié de la charge annuelle de la fabrique. La générosité des trèviens joue un rôle central dans le financement des projet portés par le général. Entre 1669-1682, la moyenne des dons se maintient autour de 325 livres. La tendance globale est ainsi à la hausse jusqu’à la fin du 17e siècle, écho de la prospérité que connait Le Quillio grâce à la bonne tenue du commerce de la toiles. Les dons des tréviens se tourne aussi envers la chapelle Saint-Maurice, plus modestes, tournant autour de 10 livres. Si les comptes de fabrique du 18e siècle ont disparu, le programme architectural et mobilier porté par le général laisse penser que la prospérité économique s’est maintenue, voir a augmenté.

Il est aussi intéressant de souligner que le registre de délibérations témoigne de la générosité des marchands de toiles envers leur église, notamment en 1767, lorsque Jacques et Pierre Guillo aumônent à la trève des étoffes de soie pour être employées au financement des ornements de l'église.

  • Période(s)
    • Principale : 2e moitié 17e siècle, 18e siècle

Documents d'archives

  • Série G. Clergé séculier ; Sous-série 20 G. Fonds des paroisses :

    - 20 G 702 : Registres de délibérations (1689-1773)

    - 20 G 703 : Comptes de l'église trèviale (1659-1698)

    - 20 G 705 : Rôles de capitations (1707-1780)

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 20 G 702, 20 G 703, 20 G 705
    20 G 702, 20 G 703, 20 G 705
  • Série C. Administrations provinciales ; sous-série 1 C. Intendance et Etats de Bretagne :

    - 1 C 6242 : Enregistrement des marques des fabricants

    Archives départementales d'Ille-et-Vilaine : 1 C 6242
    1 C 6242

Bibliographie

  • GUiLLEMOT Anthony, Prospérité toilière et chantiers paroissiaux dans les paroisses rurales de la manufacture des « bretagnes » 1650-1830, Mémoire de master d'Histoire, sous la direction de George Provost, Université Rennes 2, 2007

    Bibliothèque universitaire. Université Rennes 2 : MH 2716
    p. 46-49, 76-78
  • MARTIN, Jean. Toiles de Bretagne, La manufacture de Quintin, Uzel et Loudéac, 1670-1830. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 1998.

    Région Bretagne (Service de l'Inventaire du patrimoine culturel)
    p.163-173

Annexes

  • Le milieu marchand du Quillio
Date(s) d'enquête : 2025; Date(s) de rédaction : 2025