Cette casemate pour quatre mitrailleuse est implantée dans l'angle ouest du bunker Keroman III. Elle est englobée dans l’extension nord-ouest. Construite en béton armé sur un plan-type spécial, elle est dotée de quatre chambres de combat.
La chambre de combat nord
L’accès à cette chambre de combat se fait depuis l’extension nord-ouest du bunker KIII. Elle comporte un accès dédié avec une porte blindée à deux vantaux suivie d’une porte étanche. La chambre de combat est dotée d’un système de ventilation - avec ou sans filtration contre les gaz selon la situation - avec une bouche de soufflage à vis réglable en métal (modèle ZML01, Lüftungsventil mit Flanschanschluss) et une bouche de surpression à clapet à contrepoids en aluminium (modèle 4ML01 de marque Dräger, diamètre 100 mm, à quatre boulons) située près de l’embrasure. C’est dans le couloir d’accès que se trouvaient les trois couchettes tubulaires dont l’emplacement est reconnaissable par la fixation murale et les trois crochets [la deuxième fixation murale et les crochets ont disparu]. Si le sol en carreau de terre cuite est d’origine, les murs ont été repeints en blanc. Sur le cartouche situé au-dessus de l’embrasure de tir, on peut lire : "St. 36" [l’inscription est en partie masquée par un dispositif d’éclairage moderne à tube fluorescent].
Les trois chambres de combat sud
L’accès à ces trois chambres de combat se fait depuis l’extension nord-ouest du bunker KIII. Elles comportent un vestibule commun faisant sas d’entrée avec une porte en bois de forte épaisseur, renforcé par Z [il s’agit de la porte d’origine] et deux zones étanches.
L’entrée de la chambre de combat sud-ouest (à gauche en entrant) comporte une porte étanche. Elle sert de dépôt à des engins pyrotechniques [état en 2023]. Sur le cartouche situé au-dessus de l’embrasure, on peut lire : "St. 39 R.Nr. 88-92". Dans cet espace doté d’une bouche de soufflage à vis réglable et d’une bouche de surpression à clapet, se trouvaient probablement trois couchettes tubulaires.
Une seconde porte étanche (à gauche en entrant) donne accès à une chambrée pour les soldats et aux chambres de combat nord-ouest ("St. 37") et sud ("St. 38"). C’est dans la chambrée que se trouvait le système de ventilation des quatre chambres de combat : les emplacements de deux ventilateurs et du système de tuyauterie sont visibles. Sur les murs subsistent les quatre fixations murales [dépourvues de leurs crochets] et au plafond, les traces de quatre crochets de suspension pour couchettes tubulaires. Cette pièce pouvait vraisemblablement accueillir six soldats. Si le sol en carreau de terre cuite est d’origine, les murs ont été repeints en blanc. Près des embrasures subsistent les bouches de surpression à clapet à contrepoids.
Les postes de tir
Les quatre mitrailleuses abritées dans cette casemate assuraient la défense rapprochée du bunker KIII en lien avec les mitrailleuses de la casemate nord. Chaque embrasure pour mitrailleuse permet le tir dans un secteur différent : vers le nord, vers le nord-ouest, vers le sud-ouest et vers le sud.
Chaque chambre de combat est protégée par une plaque blindée en acier pour mitrailleuse (Schwere Stahl - Schartenplatte für MG) coulée dans le béton armé. Il s’agit d’une plaque modèle 7P7, d’une taille de 3,40 m x 2,70 m et 10 cm d’épaisseur pour un poids de 7,5 t, avec orifice de tir rectangulaire (22 cm x 30 cm) et volet d’occultation manuelle de 8 cm d’épaisseur (95 kg). Grâce à un joint en feutre, l’ouverture de tir pouvait être rendue étanche en cas d’attaque au gaz. La fente d’observation, normalement accolée à l’ouverture de tir, est noyée dans le béton.
Un socle en béton armé, accolé à la plaque blindée, sert de support à un "affût de forteresse", sellette d’affût prenant la forme d’un rail à encoche [en place], sur lequel venait se fixer le traineau coulissant de l’affût de la mitrailleuse [disparu].
Un bouclier de protection (Schutzschild) équipait vraisemblablement la mitrailleuse.
Chaque chambre de combat dispose d’un cartouche sur fond vert avec des marquages à lettrage blanc qui lui sont propre. On peut lire "St.", abréviation de Stande, abri, position en allemand, suivie du numéro de cette dernière ; "R.Nr.", abréviation de Nummer, numéro précédé de "R." (abréviation en rapport avec le champ de tir ?), suivi de deux numéros séparés par un tiret.
Chambre de combat nord : "St. 36" [R.Nr. 72-77 ?]
Chambre de combat nord-ouest : "St. 37 R.Nr. 78-82" ;
Chambre de combat sud : "St. 38 R.Nr. 83-87" ;
Chambre de combat sud-ouest : "St. 39 R.Nr. 88-92".
L'armement n’est pas spécifié mais, il est probable qu’il s’agisse de quatre mitrailleuses modèle 1908, modernisées en 1915 comme dans les autres casemates.
A l’extérieur, les embrasures de forme rectangulaire sont revêtues en bois avec un profil anti-ricochet en gradin (Trepenscharte). Le pied de la casemate est traité de la même manière, mais en béton. L’intérêt de ce profil est éviter les "coups d’embrasure" ou "effet entonnoir" ; l’intérêt du bois, en lieu et place du béton, est que les projectiles s’y fichent évitant ainsi les éclats.
Lors de tirs de nuit, la lumière intérieure devait être coupée.
Un équipage estimé à douze soldats
L’équipage de cette casemate pour quatre mitrailleuse était vraisemblablement de douze soldats soit, trois soldats par mitrailleuse, l’un au maniement de l’arme, les deux autres à l’approvisionnement en munition. Ils subsistent les fixations pour au moins neuf couchettes tubulaires (la chambre de combat sud n’a pas pu être étudiée).
Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.